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L'Afrique : les défis du développement

 

 

      

       Traditionnellement la notion de développement est définie comme l’amélioration des conditions de vie de l’ensemble de la population d’un État grâce à une croissance économique durable et une stabilité politique. Cette notion est depuis le XXème siècle indissociable de l’ouverture sur le reste du monde et de l'intégration à la mondialisation. Or l’Afrique est un continent qui semble cumuler les handicaps de développement et rester par bien des aspects à l’écart de la mondialisation. Cette vision de l’Afrique doit cependant être revisitée. S'il est vrai que les indicateurs globaux montrent une Afrique en retard et à l’écart, la situation n’est ni homogène ni figée.

Cette dissertation interroge la place du continent africain face à la mondialisation  et a pour objectif de montrer que l'Afrique ne peut plus être considérée comme étant vraiment à l'écart de la mondialisation. Les dynamiques actuelles et les situations très contrastées amènent à dépasser le constat d’une Afrique subissant dans la passivité les effets de la mondialisation. Il ne s'agit pas cependant de nier l'ampleur des défis démographiques, économiques, environnementaux et politiques que l’Afrique doit encore relever.

       Quelle est la situation de l’Afrique face aux questions de développement ? Le continent connait-il un réel décollage économique ? Quelle place occupe-t-il dans la mondialisation ? Quels défis démographiques, économiques, environnementaux et politiques l’Afrique doit-elle encore relever ?

-Après l’étude de cas sur le Sahara, ressources et conflits, nous verrons la situation du continent africain face au développement et à la mondialisation

      

 

                   I. Les défis d’un continent à l’écart du développement ?

 

       Observée à l’échelle continentale, l’Afrique cumule les indicateurs défavorables qui alimentent la représentation d’une Afrique pauvre. Les défis à relever restent très nombreux.

 

A)   L’explosion démographique et urbaine (lecture doc p. 284 et 285 : connaitre les grandes lignes)

 

La démographie africaine : L'Afrique est un continent encore assez peu densément peuplé mais c’est celui qui connaît la plus forte croissance démographique. Avec 1 milliard d'habitants, elle est aujourd'hui deux fois plus peuplée qu'en 1980 et sa population devrait doubler d'ici 30 ans. Aucune stabilisation de la croissance démographique n’est attendue avant 2100. L’accroissement naturel est ainsi de 2 % par an en Angola  et de 3,3 % au Mali (en France, 0,4 %...).  Globalement, l'Afrique est en effet en pleine transition démographique (alors que l'Europe a connu ce phénomène au XIXème siècle). De ce fait, le continent est celui qui compte le plus de jeunes au monde : la moitié de la population a moins de 25 ans. Les pays d’Afrique subsaharienne ont souvent tardé et échoué à mettre en œuvre des politiques de contrôle des naissances. À l'échelle régionale, on constate toutefois des contrastes: l'Afrique du Nord est plus avancée dans sa transition démographique. La Tunisie a ainsi un indice de fécondité de deux enfants par femme seulement.  En Afrique subsaharienne en revanche, la transition a seulement commencé. Le Mali a ainsi un indice de fécondité de sept enfants par femme. La croissance démographique non maîtrisée représente un obstacle au développement : la pression humaine s’accroit  inexorablement sur les ressources. Elle constitue un problème par les dépenses sociales qu’elle nécessite et la violence qui peut résulter de l'absence de perspective pour les jeunes : 55 % des jeunes en Afrique subsaharienne et 37 % en Afrique du Nord sont au chômage. Le phénomène des enfants-soldats, enrôlés par dans les guerres civiles comme au Liberia ou en Sierra Leone, se nourrit de cette absence de perspectives.  L'explosion démographique engendre aussi de nombreuses mobilités : aux déplacements forcés s’ajoutent des migrations économiques qui se sont accélérées, en particulier entre le Sud et le Nord du Sahara et d’Afrique centrale vers l’Afrique du sud.

 

L'urbanisation : l'Afrique est le continent qui connaît le taux d'urbanisation le plus faible (un peu moins de 40 % en 2013) mais le taux de croissance urbaine le plus rapide : la population urbaine a été multipliée par 13 depuis 1950. Un phénomène de rattrapage est ainsi à l'œuvre.  Une très forte croissance naturelle propre aux villes s’ajoute à un exode rural massif pour expliquer ce mouvement de croissance des effectifs urbains. Des villes multimillionnaires géantes, des mégapoles, s'affirment : Lagos et Le Caire comptent plus de 15 millions d'habitants, l'agglomération de Johannesburg 11 millions, Kinshasa 9 millions... Cependant la majorité des citadins vit encore dans villes petites et moyennes. L'étalement urbain représente un défi pour les autorités car il pose alors le problème de la suffisance et de la qualité des infrastructures : les municipalités doivent assurer l’accès à l’eau potable (selon l’OMS 80 % des urbains n’ont pas accès à l’eau potable), mieux desservir l’espace urbain en développant les  transports en commun, assurer la construction de logements… Ces défis ne sont pour le moment pas relevés : selon le Programme des NU pour l’environnement (PNUE), 60 % de la population africaine vivant dans les zones urbaines habite dans un bidonville. Dans certains pays africains, c'est plus de 90 % de la population urbaine qui  vit dans des bidonvilles : République centrafricaine, Sierra Leone, Soudan, Tchad... Kibéra, à Nairobi au Kenya, est considéré comme le plus gros bidonville d'Afrique et compte 700.000 habitants.

 

B)    La pauvreté et ses manifestations

 

       Carte p. 285 et doc 1 p. 287 : L'Afrique reste la région en développement avec le taux de pauvreté extrême (càd gagnant moins de 1,25 $ par jour) le plus élevé au monde : environ 46 % de la population. Les situations sont cependant très diverses selon les États : au nord du Sahara,  les États possèdent un PIB/habitant et un IDH moyen : autour de 5000 dollars/an/hab. et un IDH autour de  0,7 ou plus (Algérie, Libye, Tunisie). Il en va de même pour l'Afrique du Sud (cf. supra). L'Afrique subsaharienne en revanche connaît des chiffres dépassant rarement le 0,5 pour l’IDH et beaucoup de PIB/hab. sont inférieurs à 1500 $/hab. (RDC : 217 $/hab.). En Afrique sub, le taux de pauvreté extrême n’a qu’à peine diminué qu’à peine depuis 30 ans

       Les aspects alimentaires et sanitaires : pb Sous-nutrition et mal-nutrition. L'Afrique est même le seul continent où des famines ont eu lieu au cours des 30 dernières années, particulièrement au Sahel et dans la partie Est du continent (Darfour, Niger, Corne de l’Afrique : Somalie, Éthiopie…) : attention aux idées reçues, les famines sont plus souvent liées aux  troubles politiques qu'aux sécheresses. Sauf en cas de conflits et de sécheresse, l’extension de la surface cultivée a permis de faire à peu près face à la croissance démographique depuis les années 1980. Mais l'agriculture vivrière, reste trop peu importante et le problème du passage à une agriculture intensive reste posé : cela suppose des investissement dont la plupart des pays africains ne sont pas capables. Il faut en effet des capitaux et la volonté politique d'un État fort pour mener une Révolution verte.

Le continent est également très vulnérable aux crises sanitaires, comme le paludisme ou le sida (cf. carte p. 285) : au Swaziland ou au Botswana, près de 25 % des adultes sont séropositifs.

 

L’alphabétisation et l’éducation : accroître le niveau d’éducation des populations est un des enjeux majeurs de développement. L'Afrique est de très loin le continent le plus en retard dans ce domaine et dans de nombreux pays la situation se détériore même. Au Niger, on estime ainsi la scolarisation à 40 %, dont seulement 10 % de filles. La scolarisation des filles reste un défi entier.

 

C)                                                                                                                                                La marginalisation et la dépendance économiques

 

Le PIB africain constitue moins de 3 % de la production de richesse mondiale et l’économie africaine pèse faiblement dans le commerce mondial (3 % des échanges mondiaux, même si cette part est en augmentation). Cela s’explique par plusieurs facteurs :

 

Des économies de rente mono-exportatrices dépendantes de l'évolution des cours mondiaux : cf. carte p. 290 dans beaucoup de pays, le secteur primaire est hypertrophié. On parle de « malédiction des ressources » pour décrire le paradoxe d'un continent dont le sol et le sous-sol sont riches mais dont les populations peinent à sortir du sous-développement.

Ces ressources concernent d'une part l'exploitation agricole du sol : les espaces climatiques variés du continent permettent divers types d'agriculture destinés à l'exportation. Au nord, le climat méditerranéen a fait du Maroc un grand exportateur d’agrumes. Dans le golfe de Guinée, le climat tropical permet d’exporter du café, du cacao et des fruits tropicaux. Dans la zone sahélienne, on cultive le coton. En Afrique de l'Est (Éthiopie, Kenya) le café ou le thé. Se pose toutefois la question de la concurrence entre ces cultures destinées à l'exportation et l'agriculture vivrière. Une part importante des actifs travaille dans l'agriculture, qui reste pourtant peu productive et peu compétitive, faute de capitaux pour la moderniser. L’agriculture représente ainsi 45 % du PIB malien (contre 1 % aux États-Unis) pour des rendements de seulement 0,5 tonne/ha (contre 15 tonnes aux EU).

L'exploitation des ressources concerne aussi celles du sous-sol qui recèle d’importantes ressources énergétiques et minières : hydrocarbures (Algérie, Libye, Angola, Congo,  Nigeria), minerais (RDC, Zambie), diamants (Sierra Leone, Afrique du Sud). Cela assure aux pays des recettes parfois importantes mais les revers d'une économie de rente sont nombreux : 50 ans après les indépendances, les pays africains ne contrôlent ni les capitaux, ni la technologie,  ni les prix et ils restent soumis à leurs clients du Nord.

L’industrialisation de ces ressources reste embryonnaire.  L'exportation massive d'un seul produit et le manque de diversification de l'économie rendent donc les pays dépendants du cours des matières premières et des partenaires commerciaux. L'exploitation de ces ressources intègre l'Afrique dans les flux de la mondialisation mais les revenus de ces ressources ne sont pas bien répartis et peuvent être un facteur d’instabilité politique. Le cas de la RDC est malheureusement exemplaire à cet égard : un sous-sol très riche, des potentialités agricoles immenses mais l'un des pays les plus pauvres et les plus instables du monde.

 

Le poids de la dette et ses conséquences sociales : lors des indépendances, les jeunes États africains se sont lourdement endettés afin de moderniser leurs pays. L’effondrement du prix des matières premières au cours des années 1980 a rendu la plupart d'entre eux incapables de rembourser cette dette. La fin de la Guerre froide a de plus supprimé les aides reçues des grandes puissances dans le cadre de la lutte idéologique les opposant… Le Zimbabwe est ainsi aujourd'hui encore l'un des pays les plus endettés au monde (220 % de son PIB). Beaucoup d'États sont ainsi passés sous la tutelle des institutions financières internationales et ont été soumis à des plans d’ajustements structurels imposés par le FMI et la Banque mondiale (en vue de libéraliser leur économie et faire jouer la concurrence avec les pays du Nord extrêmement compétitifs). Si la dette de beaucoup de pays africains a depuis été jugulée, ces coupes budgétaires et la baisse de leurs revenus ont été à l'origine d'une aggravation du sous-développement et de l'instabilité politique des États africains : avec la faillite des structures étatiques et publiques, le nombre de personnes vivant sous le seuil de pauvreté explose tandis que  prospèrent la corruption et les trafics.

 

D)                                                                                                                                                Une situation politique peu favorable au développement

 

       Les pays africains se sont retrouvés indépendants dans les années 1960 sans avoir pour autant l’expérience de la démocratie. Bien souvent, ils ne disposaient pas d’une élite politique capable de prendre la suite des colonisateurs parfois partis précipitamment. L’unité politique réalisée lors de la lutte pour obtenir l’indépendance ne résiste souvent pas à l’exercice du pouvoir : les oppositions politiques minent ces jeunes nations. Elles sont fréquemment accentuées par de vives oppositions ethniques, surtout en Afrique noire. En effet, les États indépendants ont gardé les frontières héritées de la colonisation. Les Européens n’avaient pas tracé ces frontières en tenant compte des ethnies. Elles furent souvent tracées de manière rectiligne en suivant les lignes imaginaires (parallèles ou méridiens). En conséquence, elles séparent des populations qui auraient voulu vivre ensemble ou au contraire regroupent au sein d’un même État des populations parfois hostiles : Ibos, Haoussas et Yorubas au Nigeria par exemple ou encore les Hutus et les Tutsis au Rwanda.

       Ces nouveaux pays connaissent donc souvent la guerre civile. Ceux qui ont réussi à installer d’emblée une démocratie sont très peu nombreux (exemple du Sénégal de Senghor). Le pouvoir y est fréquemment confisqué par une dictature militaire qui s’appuie souvent sur une ethnie. Les régimes politiques sont donc récents, instables et peu démocratiques. Le président du Zimbabwe, Robert Mugabe, est ainsi en fonction depuis 1987, tandis qu’aucune élection présidentielle n’a eu lieu depuis la création de l'Érythrée, en 1991. De tels régimes favorisent les coups d'État, comme en République démocratique du Congo. De plus, pour beaucoup, la guerre, parce qu’elle permet de se procurer rapidement des richesses, devient plus intéressante que la paix. Entre 1991 et 2001, décennie surnommée « décennie du chaos » 35 pays sur 53 connaissent des affrontements internes.

       L'Afrique est un continent en crise car les structures d’encadrement  ont failli : beaucoup d’États africains ont peu de contrôle sur leur territoire. Le cas le plus extrême est la Somalie, dont l’autorité se limite à quelques quartiers de Mogadiscio : toute la partie Nord, le Somaliland, est un État autonome de fait. Dans d’autres États, la gestion du territoire se limite à la liquidation des ressources pour le seul enrichissement du clan au pouvoir. Le gouvernement soudanais vend ainsi les terres les plus fertiles de son pays à la Chine, alors qu’une partie importante de la population connaît encore des famines.  Dans des États aussi faibles, le manque d'investissements conduit à de lourdes lacunes en infrastructures. Ainsi, l'Afrique du Sud compte à elle seule près de la moitié du réseau routier asphalté du continent.

       La construction de structures étatiques stables et démocratiques est donc une nécessité pour le développement : ne plus considérer la rente minière ou agricole comme un outil au profit de clientèles particulières pour se maintenir au pouvoir, redistribuer la richesse, sortir de l’économie de rente pour diversifier l'économie et enrayer le développement du secteur informel. De plus, dans ce contexte de mondialisation compétitive, l’Afrique, trop divisée, doit construire des organisations régionales efficaces qui leur permettraient de pallier leur faiblesse économique et l’insuffisance du marché intérieur.  Aujourd’hui plus de 200 organisations censées favoriser l’intégration régionale existent en Afrique. La plupart d’entre elles ne sont que des coquilles vides : les économies et les infrastructures des pays sont encore tournées vers les anciennes métropoles, les EU ou la Chine. Cinq organisations régionales paraissent plus avancées et plus tangibles que les autres, même si elles n’ont que peu d’effets intégrateurs, aucune n’ayant véritablement mis en place un marché commun  :  UMA (Union du Maghreb) - CEDEAO (Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest) - CEMAC (Communauté économique et monétaire des États d’Afrique centrale) - COMESA (Marché commun de l’Afrique australe et orientale) - SADC (Southern African Development Community). L’Union africaine ne demeure qu'un forum politique.

 

E)                                                                                                                                                Les tensions environnementales

 

       De nombreux écosystèmes sont menacés : l'exploitation des ressources se fait la plupart du temps sur le mode de la prédation, avec pour objectif le profit immédiat, sans souci de leur renouvellement ni des conséquences écologiques et sociales à long terme. Ainsi, le delta du Niger aurait subi 7000 marées noires entre 1970 et 2000. La pêche industrielle au large des côtes africaines du Golfe de Guinée, très poissonneuses, a considérablement réduit la ressource halieutique dont dépendent près de 1 millions de pêcheurs artisanaux. Les firmes étrangères qui exploitent les ressources pétrolières, minières, forestières sont régulièrement accusées de mauvaises pratiques par les ONG et certains États : pollution, évasion fiscale, exploitation de la main d'œuvre. L’agriculture exportatrice et l’utilisation d’OGM provoquent des dégradations de sols et inquiètent l’OMS. Les surfaces forestières ont reculé depuis 1980. L’urbanisation rapide s’accompagne de la prolifération d’habitats précaires et de pollutions graves.

       Confrontée à ces multiples défis, l’Afrique se caractérise par sa grande vulnérabilité. Sa pauvreté, la faiblesse des États et les difficultés de l’aménagement du territoire font que les risques naturels y exercent des ravages plus importants qu’ailleurs fautes de moyens et de politiques préventives pour y faire face.

 

       Les défis à relever restent nombreux pour l'Afrique : faire face à la croissance démographique la plus forte de la planète, maîtriser la croissance urbaine difficile, subvenir aux besoins alimentaires, gérer les questions environnementales ; surmonter les divisions et progresser vers une intégration continentale

 

                   II. De nouvelles perspectives pour l'Afrique

 

                               A) Une meilleure insertion dans la mondialisation

 

Une situation économique qui s'améliore :

D'une part, les taux de croissance économique sont exceptionnels dans les années 2000 : en dehors  des pays en guerre ou agités par des troubles civils (Somalie, Ouganda, RDC, Zimbabwe…),la plupart des pays africains a renoué des taux de croissance positifs : cette croissance atteint aujourd'hui en moyenne 5 % par an, parfois beaucoup plus : les pays pétroliers en particulier (Algérie, Libye, Nigeria, Angola, Ghana) affichent des taux de croissance proches de ceux de la Chine. Certes, les pays africains partent de loin et ce rythme n’est pas suffisant pour mener à un rattrapage rapide, mais il montre un renversement de tendance par rapport à la décennie catastrophique 1990. La hausse descours des matières premières explique en partie cette évolution. Les places financières africaines sont à la hausse et de nouvelles puissances émergent comme l’Afrique du Sud, les pays du Maghreb, l'Égypte… De grands chantiers sont ainsi en cours afin de profiter de cette croissance économique pour moderniser les pays et mieux les insérer dans la mondialisation par la réalisation d'infrastructures : nouveau port de Djibouti, ligne TGV  Tanger-Marrakech, corridors de circulation autoroutiers dans le Golfe de Guinée...

D'autre part, l'allégement du poids de la dette et le retour de l'Aide Publique au Développement : l’APD provient essentiellement mais pas exclusivement des pays du Nord (cf. Inde et Chine vers l’Afrique Noire aujourd’hui). Dans les années 1990, elle recule fortement, notamment parce qu’elle était pensée comme un outil d’influence durant la Guerre froide : les montants alloués baissent de 40 %.  Dans les années 2000, une prise de conscience a lieu de la part des pays riches (qui peut-être commencent à mesurer les effets de la pauvreté d’un point de vue géopolitique et migratoire). L’augmentation de l’APD s’est accompagnée d’annulations effectives de la dette car la communauté internationale a pris conscience que l’Afrique ne parvenait pas à sortir de sa situation d’endettement à cause des intérêts qu'elle avait à payer : lors de la réunion du G8 en 2005, il a été décidé d’annuler la dette de 18 pays pauvres. Si l'APD représente en général moins de 0,5 % du PIB des pays donateurs, elle reste essentielle pour beaucoup de pays africains puisqu’elle constitue souvent plus de 15 % de leurs revenus (parfois beaucoup plus).

 

Un continent qui attire plus les investisseurs : l'Afrique est traditionnellement un espace soumis eux puissances étrangères : anciennes puissances coloniales (au premier rang desquelles la France et la GB), superpuissances pendant la Guerre froide.La fin de la GF lui avait fait perdre une partie de son intérêt stratégique aux yeux des puissances étrangères. Avec la hausse du prix des matières premières dans les années 2000, les grandes puissances mondiales ont retrouvé un certain intérêt pour le continent africain. À ces dernières s'ajoutent depuis une dizaine d'années les puissances émergentes :  l’Afrique attire de plus en plus les investisseurs, qui misent sur l'exploitation de ses ressources (60 % des réserves de terres cultivables, 2ème massif forestier au monde, 80 % des réserves de coltan, immense potentiel d'énergies renouvelables) ainsi que sur la jeunesse de sa population, qui en fait un marché potentiellement très important. Les investisseurs sont principalement des FTN issues des anciennes puissances coloniales, comme Total ou Areva pour la France. Les investisseurs américains, indiens, brésiliens ou des pays du golfe persique s'intéressent également de plus en plus à l'Afrique, notamment pour y acquérir des terres agricoles ou investir dans l'exploitation des matières premières.
La Chine, en particulier, mène une politique d’implantation systématique en Afrique, répondant à des objectifs  économiques et géopolitiques: outre l'exploitation des matières premières et les investissements qu'elle effectue pour construire des infrastructures, cette dernière acquiert des terres pour la production alimentaire (la Chine aurait d'ores et déjà acquis l'équivalent de la superficie française dans des pays comme l'Ouganda, le Zimbabwe, la Zambie...).

L'ouverture de l'Afrique est aussi accélérée par l'importance des diasporas africaines dans le monde, notamment en Europe. Aux migrants économiques peu qualifiés s'ajoute le « brain drain » des jeunes diplômés. Les transferts financiers de ces diasporas sont parfois la première source de capitaux dans certains pays comme le Sénégal ou le Mali.

 

Le désenclavement numérique : l'Afrique vit une révolution des télécommunications, avec 620 millions de téléphones portables sur le continent africain en 2012. Dans ces régions qui ont longtemps souffert d'un manque d'infrastructures de téléphonie fixe, les réseaux cellulaires sont moins coûteux et beaucoup plus rapides à déployer. Les zones rurales africaines sont désormais reliées au reste du monde. L'accès à internet, sous des formes multiples, se développe lui aussi. Les câbles sous-marins haut débit améliorent l'accès des villes côtières à internet. Les pays riverains de la Méditerranée et l'Afrique Sud concentrent cependant la moitié des internautes du continent : la fracture numérique reste importante. On a ainsi pu juger de l'importance des réseaux sociaux dans les révolutions égyptienne ou tunisienne de 2011.

 

Ces atouts concernent cependant particulièrement les pays d'Afrique septentrionale et australe. L'Afrique du Nord est ouverte vers la Méditerranée et donc vers l'Europe et le Moyen-Orient. Elle dispose ainsi d'un potentiel important d'intégration aux flux, qu'elle exploite en échangeant des hydrocarbures, des produits agricoles ou en s'ouvrant au tourisme. C'est aussi un espace de délocalisation industrielle pour les pays du Nord (voir cours sur la mondial : zone France Tanger). L'Afrique du Sud, de son côté, est la principale économie du continent et possède une industrie solide (cf. partie suivante). La situation des pays du centre de l’Afrique est plus difficile. Les pays de la zone sahélienne et subsaharienne en particulier, comme le Mali, le Niger ou le Zimbabwe souffrent de leur situation enclavée, qui les exclut du dynamisme caractérisant les zones littorales dans l'espace mondial.

 

                               B) Des évolutions politiques et sociales positives

 

Un continent en voie de pacification : les années 1990, que l'on a pu appeler la décennie du chaos, font désormais partie de l’histoire de l’Afrique. En effet, alors que dans les années 1990, sur les 53 États que compte le continent 35 connaissaient une situation de conflit, la réintégration de l’Afrique dans l’agenda stratégique des grandes puissances se traduit sur le terrain par la fin de nombreuses guerres civiles : l’Angola s’est pacifié en devenant le 2ème pays africain fournisseur de pétrole aux États-Unis (derrière le Nigeria), le Burundi,  la Sierra Leone, le Liberia, le Soudan et le Congo-Brazzaville s’engagent dans des processus de réconciliation. Dans ces pays longtemps meurtris, les populations civiles manifestent une aptitude extraordinairement rapide, en dépit des drames qu’elles ont endurés, à reprendre la multiplicité des activités économiques et des échanges. Les révolutions arabes de 2011 portent la marque d'une volonté de démocratisation du continent. Cependant, le tableau ne doit pas être idéalisé car toute l’Afrique n’est pas pacifiée (Côte d'ivoire, RDC…) et les récentes révolutions arabes ont installé un ordre politique encore précaire et âprement discuté. 

 

Des évolutions sociales significatives : dans la plupart des pays, des classes moyennes se constituent avides de biens de consommation. La forte urbanisation a crée une classe de citadins dont les modes de vie et les aspirations sont calqués sur le reste du monde. Les révolutions arabes sont justement portées par des classes moyennes, instruites : l’éveil de la revendication politique et démocratique est un des signes de la volonté des Africains de prendre leur destin en main.

 

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